Dans mon article précédent, je vous ai présenté les bases de l'ayurveda : les cinq éléments, les trois doshas et leurs qualités, le prakriti ou constitution ayurvédique (si ce n’est dejà fait, déterminez-là ici). Cette constitution est notre héritage énergétique, il nous vient de nos parents, nous sommes nés avec. En adoptant une alimentation et un style de vie appropriés à notre constitution de base, nous pouvons entretenir ce potentiel énergétique qui nous est unique, et donc se sentir en bonne santé corps et esprit. Mais voilà…

…la plupart du temps nous sommes un peu déséquilibrés ! Et c’est normal. Le monde physique nous soumet constamment à des forces opposées, extérieures et intérieures : environnements trop chauds, trop froids, trop secs ou humides, des envies insatisfaites, des peurs, des doutes, un emploi du temps hyper-chargé, les envies d’autres personnes à gérer, on dit oui quand on veut dire non, non quand on veut dire oui …bref, notre existence terrestre nous tiraille constamment et fait qu’il est difficile, voire impossible, de rester très longtemps dans un état d'équilibre parfait. Cet état de santé imparfait, l’ayurveda l’appelle notre vikriti. En sanskrite "vi" signifie "après" et "kruti" signifie "création". Selon cette traduction, le vikruti d'une personne est l'état des trois doshas (vata, pitta, kapha) après le moment de la conception. C’est dire ! Comme si s'incarner était en soi un obstacle à une santé parfaite. Peut-être est-ce d’ailleurs le prix à payer pour justement goûter à à la diversité que nous offre notre belle planète : une large palette d'émotions, de sensations, de goûts, d'odeurs, de sons et paysages, autrement dit une multitude d'expériences contrastées, toutes aussi tentantes les unes que les autres… Mais je m'égare, car même si ces tentations sont sans fins et que l'équilibre parfait est souvent insaisissable, il est possible de minimiser à quel point nous nous en éloignons, afin de se trouver plus souvent sur “la voie du milieu”, comme le préconise sagement le bouddha.

Revenir à la voie du milieu, c'est-à-dire à l'équilibre

#1 Adopter une alimentation et un mode de vie adaptés à son prakriti

Déterminez votre constitution (ou profil psycho-corporel). Ensuite, découvrez les recommandations alimentaires et le style de vie les mieux adaptés à cette constitution (ici). Vous connaissez peut-être déjà certaines de ces recommandations, d'autres non. Il est fort possible qu'en modifiant légèrement vos habitudes quotidiennes vous puissiez améliorer votre état de santé général. Mais nous pouvons affiner notre approche.

#2 IDENTIFIER LES Attributs DOMINANTS EN SOI

Suivre un régime et mode de vie appropriés à sa constitution ne peut fonctionner que dans une certaine mesure, car comme je l’écrivais plus haut, nous sommes souvent dans un état de déséquilibre. De ce fait, il est possible de manifester des symptômes qui ne sont pas propres à sa constitution (prakriti). C'est alors qu'il devient plus pertinent d'identifier en nous les attributs dominants, qu’ils soient vata, pitta ou kapha.

Par exemple, imaginons que votre constitution de base est vata-pitta. Depuis peu, sous l'effet d'un stress important, vous vous êtes mis.e à grignoter et à consommer plus d'alcool pour décompresser. Le résultat est une prise de poids (lourdeur physique), qui se traduit maintenant en manque d’énergie et de motivation (lourdeur mentale) (qui pourrait elle-même être contrebalancée par une prise excessive de caféine, ajoutant une autre couche de déséquilibre, mais ne compliquons pas les choses !)

En ayurveda, cette lourdeur est perçu comme un excès de l’élément terre (énergie kapha). Mais si vous vous en tenez strictement à un mode de vie et un régime apaisant pour votre constitution vata-pitta, vous risquez de prendre plus de poids. Pourquoi ? Vata et pitta sont des énergies légères (air, feu…). Elle bénéficient toutes deux d’une alimentation plutôt dense et de ralentir, deux choses qui vont alourdir kapha. De ce fait, en dépit de votre profil vata-pitta, il faudra traiter l'excès de lourdeur en priorité en adoptant une alimentation plus légère d’abord (moins de glucides, simples et complexes). Mais plus important encore, compte tenu que la source de toute cette lourdeur est d’ordre psychologique (stress), il faudra trouver un moyen de libérer les tensions mentales et prendre du recul, afin de retrouver une certaine légèreté d'être. Une pratique à la fois sportive, fun et d’intensité moyenne pourrait jouer ce rôle.

Les 20 attributs (gunas)

L’ayurveda reconnaît au total 10 paires d’attributs (ou qualités) fondamentales (appelés en sankrite gunas). On les retrouve dans nos aliments, plantes, herbes, minéraux et vitamines, ainsi que dans nos schémas émotionnels, habitudes mentales et symptômes physiques. Bien sûr, ils sont tous des expressions de vata, pitta et kapha. Mais oubliez les doshas et votre constitution de base pour un instant, et familiariser vous plutôt avec chacun de ces attributs, et la façon dont il s’exprime. En observant ceux qui dominent votre expérience de vie, vous serez progressivement en mesure de brosser un tableau plus raffiné de votre état actuel, et surtout de déterminer les attributs inverses dont vous avez besoin pour revenir à la fameuse voie du milieu.

Voici ces 20 paires d’attributs :

1. lourd / léger

2. lent / vif

3. froid / chaud

4. sec / huileux

5. visqueux / rugueux

6. dense / liquide

7. mou / dur

8. stable / mobile

9. subtil / grossier

10. nébuleux / clair

Deux attributs opposés s'équilibrent

Comme vous pouvez le voir, ces attributs s’opposent, ce qui signifie aussi qu'ils s'équilibrent. Si l’un est présent en excès, il suffit d'introduire d’avantage l’attribut opposé dans votre mode de vie et/ou alimentation pour rétablir l’équilibre. C’est une façon élégante de revenir au bien-être physique et mental.

Voici quelques exemples pour vous aider à mieux comprendre comment chaque attribut peut se manifester lorsqu'il est dominant :

Trop de :

Lourdeur = manque de joie, dépression, excès de poids, sentiment d'être coincé, d’avoir perdu tout engouement et inspiration pour quoi que ce soit.

Légèreté = manque d’ancrage, on a l’impression de flotter, on se disperse facilement, insuffisance pondérale, agitation, anxiété, troubles de la concentration et du sommeil.

Froideur = mauvaise circulation, mains et pieds froids, métabolisme lent, toux.

Chaleur = états inflammatoires, transpiration excessive, chute de cheveux, impatience, irritabilité, colère.

Sécheresse = eczema sec, pellicules, constipation, articulations raides et craquantes.

Onctuosité = peau grasse, selles molles, acné.

Mobilité = articulations lâches, agitation, insomnie, on entreprend beaucoup de projets sans les amener à bout, toujours dans l’action, sans but précis, épuisement nerveux et physique.

Stabilité, lenteur = dépression, sentiment d'être coincé creativement parlant, paresse, sommeil excessif, démotivation, ennui, déconnecté du vivant (qui lui est toujours en mouvement)

Clarté = oubli rapide, expérience du vide et de la solitude, perte de poids, obsession avec le nettoyage (de sa maison, de soi-même.. ), rêves vifs, expériences para-normales dérangeantes.

Nébulosité = brouillard cérébral, confusion.

Et maintenant…

# 1 Examinez les différents domaines de votre vie : votre alimentation, vos habitudes de sommeil, de travail, de self-care, la façon dont vous structurez vos journées, trajets, voyages, relations pro et perso… Notez les attributs qui dominent.

#2 Une fois ces attributs identifiés, réfléchissez à comment introduire d’avantage leur inverse au quotidien, en modifiant certaines habitudes et votre alimentation. Soyez bien conscient.e de l'influence de vos relations (amoureuses, amicales, professionnelles) sur votre bien-être. Elles nous influencent peut-être plus que tout. Dans la mesure du possible, choisissez de passer du temps avec des personnes dont vous appréciez la compagnie !

Imaginons un autre scénario :

Vous vous sentez particulièrement colérique ces derniers temps (chaleur excessive au niveau mental).
C'est l'été (chaleur excessive dans l'atmosphère).
Votre bureau n'est pas climatisé, ou du moins mal aéré (excès de chaleur dans votre environnement clos).
Vous mangez des plats épicés (nourriture chaude énergétiquement)
Vous allez courir en milieu de journée, ou prenez des cours de gym dans une salle mal ventilée (activité physique chauffante)
Vous vous couchez vers minuit tous les jours (un moment où l'élément du feu est très actif)

Ce scénario présente une accumulation de l’attribut chaud, nécessitant un refroidissement massif. Comment? Voici quelques suggestions :

Incorporez plus de salades, de crudités, de légumes verts amers au déjeuner.
Portez des vêtements amples et légers de couleurs apaisantes telles que le blanc, le bleu et le vert pâle.
Le plus souvent possible, allez vous baigner dans un cours d'eau naturel, sinon prenez des douches fraîches, voire froides.
Marchez pieds nus dans l'herbe, de préférence tôt le matin.
Méditez sur des visuels d'eau et de lune pour rafraîchir votre esprit.
Vaporisez un peu d'eau de rose sur votre visage (comme celle-ci) tout au long de la journée (la rose apaise les états inflammatoires).
Décompressez régulièrement de façon naturelle avec des cours de yoga et des massages.
Couchez-vous vers 22h.

A force d'observer, vous comprendrez de mieux en mieux ces attributs, vous finirez par les voir partout ! Si vous avez besoin d'aide, consultez un praticien ayurvédique qui vous fera des recommandations sur mesure, en fonction de votre prakriti et vikriti.

Une dernière pensée

Notre société voudrait nous faire croire qu'il faut toujours se tourner vers des "experts" pour savoir comment manger, respirer, bouger et plus encore. Parallèlement, des études cliniques sont régulièrement publiées qui contredisent les précédentes, obligeant ces mêmes experts à réévaluer leurs recommandations. Plutôt déroutant, n'est-ce pas ? C'est alors que l'ayurveda nous rappelle à l’ordre. Ce système de guérison traditionnel millénaire nous rappelle que nous possédons ce qu’il faut pour devenir des experts de notre propre santé. Il nous invite à écouter, et faire confiance à la profonde sagesse qui réside en chacun (cette même sagesse peut d’ailleurs nous guider vers une consultation médicale, soit dit en passant !) L'ayurveda nous rappelle que si nous prêtons attention aux effets de nos actions, si nous utilisons notre intelligence, notre bon sens, notre capacité de discernement et d'intuition, nous pouvons dans une large mesure faire les meilleurs choix à tout moment, et reprendre ainsi le chemin de la bonne santé.

Bonne route !

Sylvie

yoga et massages à saint-Remy-de-Provence